Rencontre avec Sabrina Amrani à la 1:54 Londres

 

 

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A l’occasion de la 4ème édition de la 1 :54 Contemporary Art Fair à Londres, nous avons interviewé Sabrina Amrani, à la tête de la galerie éponyme basée à Madrid depuis 2011. Cette jeune franco-algérienne présente cette année 5 artistes : 4 femmes et un homme.

img_5725Sabrina Amrani, vous êtes franco-algérienne et à la tête de la galerie éponyme basée à Madrid depuis 2011. Pouvez-vous nous expliquer plus en détails cette aventure et le choix de vous implanter à Madrid?

 Quand j’ai décidé d’ouvrir la galerie je vivais déjà en Espagne, tout simplement car c’est un pays que j’aime beaucoup.  Mais, en effet, je me suis posée la question de savoir si j’allais rester à Madrid ou peut être m’installer ailleurs … à Paris, Londres ou Dubaï … Quand j’ai ouvert la galerie à Madrid, j’avais décidé de commencer par présenter un programme d’artistes du Nord de l’Afrique et du Moyen-Orient. L’Espagne a un héritage arabo-andalou très important, et du coup ça faisait totalement sens d’être ici.

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Comment expliquez-vous l’engouement de l’Espagne pour l’art contemporain africain ?

Quand j’ai ouvert la galerie en 2011, je n’ai pas eu l’impression qu’il y avait spécialement un grand intérêt pour l’art contemporain africain ou du Moyen-Orient. Mais finalement, le printemps arabe très présent dans les médias, a amené les espagnols à s’intéresser de plus près aux cultures africaines et du Moyen-Orient. C’est un événement malheureux car c’est quand même un moment de conflit et d’incertitude ; mais il a permis de faciliter une certaine curiosité et du coup d’ouvrir des portes. Depuis deux ans, on commence à sentir en Espagne un réel intérêt pour regarder ce qui se passe de l’autre côté de la frontière sud, dans le Nord de l’Afrique et dans l’Afrique en général. Ça reste quelque chose de très nouveau. Les collectionneurs privés n’ont pas forcément un grand intérêt, mais cet intérêt se manifeste surtout du côté des institutions, des musées, des fondations qui commencent à vraiment accueillir ces deux dernières années de grandes quantités d’expositions qui réunissent des artistes africains et notamment cette dernière année plusieurs expositions qui réunissent exclusivement des artistes femmes africaines comme l’exposition L’iris de Lucy : la femme africaine à l’honneur présentée au Musac à Leon dont le commissaire  Orlando Britto Jinorio, est le Directeur du CAAM (Centro Atlantico di Arte Moderno)  à Las Palmas de Gran Canaria.

C’est votre deuxième participation à la 1:54 à Londres, que retenez-vous de l’édition passée et qu’attendez-vous de cette nouvelle édition ?

 Un très bon souvenir de l’année dernière : c’est l’acquisition par la Smithsonian Institution de Washington DC du travail de Joël Andrianomearisoa. Ensuite, une des choses qui est remarquable avec 1:54 c’est la présence extrêmement forte de collectionneurs, de collections institutionnels, de commissaires.1:54 rassemble un public professionnel qui vient vraiment pour voir de l’art africain. Ici, l’art africain est à l’honneur et ce n’est pas forcément évident quand on travaille dans des foires internationales où finalement l’art africain et les galeries africaines sont très peu représentées …

Il y quelques mois, en mai 2016 vous avez participé également à la 1:54 à New York pour la première fois, pourquoi avoir fait ce choix cette année ? Percevez-vous une différence entre ces deux foires dans deux grandes capitales mondiales, l’une à Londres, l’autre à New-York ?

Ce sont des publics totalement différents mais deux foires complémentaires. A 1 :54 New-York, c’est vraiment un public afro-américain qui se rapproche. Tandis qu’ici à Londres, c’est un public intéressé par l’art contemporain africain, mais qui n’est pas forcément africain, ni forcément anglais non plus. La grande surprise pour moi, pour cette première participation à New-York, a été de constater cette proximité des Etats-Unis avec l’Afrique quand finalement de manière naïve je m’attendais à voir peut être plus de proximité ici en Europe du fait de la proximité géographique…

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Quel est le regard du public américain et de sa réception de l’art contemporain africain ?

A New-York, la  présence institutionnelle sur le territoire est impressionnante et les musées sont beaucoup plus ouverts. En Europe, on a plus affaire à des départements d’art contemporain africain, alors qu’aux Etats-Unis, la foire 1:54 touche plus les départements d’art contemporain. Et j’espère que c’est quelque chose qui va se produire dans les années futures ici, c’est-à-dire ne plus parler seulement d’art africain. En effet, j’aimerais que tous ces artistes que l’on voit cette semaine à la Somerset House ne soient plus vus simplement comme des artistes africains mais comme des artistes contemporains.

 Votre galerie présente le travail de femmes artistes, ici à la foire vous avez choisi de présenter le travail de quatre d’entre elles : Benbouchta Amina, Bouabdellah Zoulikha et De Miranda Mónica et Nicène Kossentini, pourquoi ce choix ? Pouvez-vous nous en dire plus sur leur travail ?

 Sur la foire je présente tous mes artistes africains : quatre femmes et un homme. Je dirai que naturellement dans ma galerie la représentation féminine est très élevée.  Ce sont des choix personnels, je n’avais pas l’intention de montrer plus de femmes à 1:54 car déjà dans la galerie les femmes sont très présentes. La galerie est un reflet de ma personne, des choses auxquelles je crois et que je défends. On pourrait presque faire une psychanalyse du galeriste et de son programme artistique pour le comprendre. Je ne dirais pas que je suis une féministe, mais effectivement je suis engagée sur des questions sociales, politiques, et économiques ; et la femme est toujours au centre de ces questions. C’est la raison pour laquelle je présente des femmes artistes. Sur les quatre artistes femmes présentées à la foire, deux d’entre elles sont vraiment des féministes et parlent dans leur pratique de la question de la femme contemporaine dans les sociétés modernes.

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 Quelle est votre vision future du marché de l’art contemporain africain ? Voyez-vous une tendance à la structuration du marché pouvant s’inscrire dans le long terme ou pensez- vous au contraire que cet engouement soit un effet de mode, un phénomène éphémère ?

 Je pense que les collectionneurs d’art africain ont toujours été là. La seule différence c’est qu’avec 1 :54 on participe une foire d’art africain à Londres, avec l’opportunité de convertir d’autres collectionneurs. Je suis le marché car c’est mon travail, mais je n’y prête pas non plus trop d’attention, je travaille surtout avec des artistes que j’aime. Je crois à la discrimination positive. S’il faut avoir une foire africaine aujourd’hui à Londres pour que dans dix ans, ce soit normal d’acheter des artistes africains sans penser qu’ils soient africains, mais des artistes contemporains et universels c’est très bien. Oui c’est peut être une mode, mais de toutes les modes il reste toujours quelque chose après. On travaille pour que  les choses se normalisent  et que les étiquettes tombent.Mais il faut laisser du temps au temps.  On ne peut pas demander à l’Europe d’embrasser tout l’art africain. Est-ce que les collectionneurs africains collectionnent spécialement les artistes anglais ou espagnols ?

Images: Courtesy des artistes et Sabrina Amrani.

 http://1-54.com/london/

http://www.sabrinaamrani.com/

Article republié sur IAM :

http://www.iam-africa.com/rencontres-154-galerie-sabrina-amrani/

 

 

 

 

 

 

 

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